dimanche 8 décembre 2019

Ténéro (à la tienne héros ! T’Enero ?)

Un jour de septembre pas de janvier, non nous ne sommes pas nous-mêmes du patrimoine qu’on visite tout le long de ce dimanche ah certes pas ! Non, nous défilons pour l’association Tenero histoire de guetter l’huître et l’iode cabrioler autour de nos carcasses ébahies1 ! Qui restaure une Tour très ancienne dont les origines sont discutées : soit la Tour Ténéro n’a été qu’un poste de gardiennage des parcs à huîtres et daterait alors de la fin du XIXe siècle, soit elle a pour origine un poste de douane, reconverti plus tard en poste de surveillance des parcs à huîtres, et serait alors plus ancienne d’au moins un siècle, donc, fin XVIIIème !
Nous n’étions pas demandés sur le lieu – est-ce si étonnant ?- pour donner notre avis d’historiens avisés mais pour défiler sur le continent version Cadouarn.2
Un démarrage diesel nous fait faire escale matutinale (pour un dimanche) dans un sympathique troquet Aux Joyeux Sinagots3 qu’on retrouvera sur les coups de midi pour un apéro bien envoyé !
Les loges ne semblent pas nous avoir attendu-e-s, elles ont déjà filé soit au large pour des aventures avec un autre groupe local de fêlé-e-s, soit ridiculement petites (2 mètres sur 3) sont allées se terrer sous un tumulus tout proche en espérant qu’on ne leur veuille pas trop ! Foin de barnum étriqué, une maison nous attend ! Un dressing ? Un bureau ? Que nenni, le Dé du jour compte 13 ramequins et les Trodchef 7 ou 8 musiciens, la place sera trop chère ! Nous optons alors pour « l’éloge du jardin » et nous installons cahin-caha à même la pelouse ! Diantre, à l’ombre, le fond de l’air reste frisquet mais le ciel est d’azur et rien n’arrête des ramequins en goguette car le soleil va poindre ! Sœur Anne ne vois-tu rien venir ? Une haie et une palissade nous cachent des d’abord rares passants venus assister à une démonstration de taï chi chuan4 à même la route toute proche. Les rires et autres éclats vocaux intempestifs sont priés d’être rangés dans leur étui buccal le temps de quelques mouvements partagés, les tenues noires semblent des uniformes d’arts martiaux droit venus de Shangaï voire de Dekatlong ! Les respirations supposément abdominales sont calmes, les têtes même chenues sont droites, dans le prolongement du tronc, comme maintenues vers le ciel bleu par un fil ténu mais invisible et robuste. On peut deviner que la pointe des langues est collée contre le palais de chacun-e afin – vous l’aurez compris de vous-mêmes, perspicaces que vous êtes- de faciliter la circulation de l'énergie intérieure (qi) en soi5.
Quelques instants plus tard, il faut avoir vu la sacrée armada de bigoudens toutes plus originales les unes que les autres et déjà fort connues du Dé mais pas des gens d’ici dévaler la rue principale qui mène à la mer au rythme débridé d’une tortue en hibernation : les gestes sont sûrs, les bras assomment fictivement quelques oursins menaçants ou autres matelots tripoteurs, les jambes déroulent leurs articulations souples et apaisées sur le bitume même, dans un silence à peine écorché par les commentaires admiratifs d’un Monsieur Loyal sauce hispanique (à défaut d’être couleur locale). La fanfare lance alors son haro sur la bigouden qui, ni une ni deux (mais 12 !) part avec ses ramequin-e-s dans un an-dro endiablé. Les appareils photos crépitent, enfin ne crépitent plus vu que les numériques n’ont pas ou presque plus d’effets sonores et stockent en leurs pachydermiques mémoires les preuves tangibles qu’à 11 heures ce dimanche matin-là un vol de bigoudens déjantées a bien été repéré sur la commune de Séné à 2 minutes à vol de coiffe de la tour Ténéro !
Le temps de quelques morceaux bien sentis par des Trodchef en verve manifeste et en tenue superbe –ah, les shoes ! ah les chaussettes ! ah matez-moi ça comme c’est joli !-, la collection Laisse de mer puis la collection Rayures du temps qui passe emportent avec bonhomie le joli petit public massé sur le bord de la rue, vers des contrées où la jovialité n’est pas en rade dans le Golfe mais bien là ! à portée de lèvres et mirettes amusées.
Des « Oh mais ça doit vous demander de sacrées heures de boulot, ces chorégraphies » fusent, des « Ah mais c’est pas vrai ! non mais regarde, c’est fait avec des… » parsèment le chemin avec bienveillance. Il n’y a plus qu’à ramasser (des heures de bulot, je vous dis !), parfois naît un « Fais chier ! » d’un automobiliste coincé dans son véhicule immatriculé 1245 BG 56 quand il réalise qu’il va, comme sur le Gois à marée montante, devoir attendre que ces mannequins de m… finissent leurs simagrées pour libérer l’accès, la sagacité féline de Mary et Armelle tout en pneus et autres cordages qui ont vécu, achève l’agressivité du zigue qui finit par… sourire !
Plus tard, la collection finale est un Best Of, les coups de cœur disponibles pour les unes et les autres, histoire de finir de se faire plaisir, le soleil là-haut n’en perd pas une miette, il a juste envoyé un peu de vent pour que certains tissus s’agitent voluptueusement sur les silhouettes, langoureusement les corps exultent… Le soleil, lui, se pâme !
Le mélange entre ciel et terre du Dé et des Trodchefs donne à voir, à sourire, à rire. Une fois encore. La rencontre avec les spectateurs est d’emblée douce et jouasse, ça sent encore un peu les vacances, les épaules sont brunies, les sandales jouent les prolongations. Il y a du sable entre les orteils, un peu de varech en guirlande accroché à un short, du beurre salé dans une barbe, vestige du casse-croûte de dix heures, un chapeau d’été aux couleurs passées qu’on renouvellera pour la saison prochaine, une petite nonchalance irrésistible comme pour empêcher l’automne de rappliquer trop vite…
Tout le monde remonte au café en dansant chantant défilant pour conclure les festivités, un apéro attend histoire d’étancher sa soif, de féliciter Sébastien pour son premier défilé en ramequin, de croire encore à la chaleur d’Ubuntu…
Un pique-nique sur la plage, tout concourt à être bien ! On va se gêner, non mais ! Un quatuor quasi Déjoyeutiste (Vonjy, Joël, Sébastien et Rit'z) a dormi en éclaireurs la nuit dernière dans la dite Tour Ténéro mais le vent à la marée qui monte, se lève et empêchera les autres d’aller de visu découvrir ou retrouver la dite Tour.
On se dit alors qu’on va demain vouloir vaquer à nos autres occupations saines oui mais aussi rigolotes ?

Kloup


5 Non, deux personnes faisant du tai chi de concert n’adjoignent pas leur énergie en un qi-qi légendaire ! Non QiQi, ne fais pas pipi sur le tapis il est en soie ! je m’égare je m’égare